Dossiers

Journaliste sportive : « Il faut qu’on prouve pourquoi on est là. »

Journaliste chez L’Equipe depuis 10 ans, Annabelle Rolnin est spécialisée dans les sports olympiques et plus particulièrement dans l’athlétisme. Cette ancienne athlète de 32 ans fait partie de ces rares femmes exerçant dans le journalisme sportif. Entretien :

Annabelle Rolnin, pendant les JO 2018 ©️ Annabelle Rolnin Annabelle Rolnin, pendant les JO 2018 ©️ Annabelle Rolnin

Ancienne lanceuse de marteau à haut niveau chez les jeunes, Annabelle Rolnin a fait des études de journalisme en parallèle à l’Institut National du Sport, de l’Expertise et de la Performance (Insep).

Le journalisme sportif est composé majoritairement d’hommes. Vous sentez-vous à l’aise dans ce milieu ?

Oui, j’y suis à l’aise, ça ne me dérange pas que ce soit un milieu majoritairement masculin. Je viens d’une discipline particulièrement masculine, où les femmes sont arrivées très tard. Le lancer de marteau n’était pas olympique avant 2000. C’est une discipline qui est quand même un peu macho. Je suis habituée à faire mes preuves. Parce que quand on est une femme, que ce soit dans le lancer de marteau ou dans le journalisme, il faut qu’on prouve pourquoi on est là, qu’on le mérite et qu’on s’intéresse vraiment au sport. Prouver qu’on a des vraies passions et des vraies connaissances, qu’on a de la valeur, qu’on est tenace : qu’on ne lâche pas l’affaire. Il faut montrer qu’on a du caractère et qu’on ne se laisse pas marcher sur les pieds.

Comment avez-vous fait votre place ?

Se faire sa place dans le journalisme, ça passe par le travail. Moi, je suis arrivée dans la rédaction web de L’Equipe au départ, je ne faisais pas beaucoup d’athlétisme. Je faisais beaucoup de sport : tennis, basket, rugby et je ne m’y connaissais pas beaucoup. Il faut s’intéresser, il faut bosser. Il ne faut pas lâcher et prouver qu’on a les mêmes compétences que tout le monde.

Avez-vous déjà subi des remarques ou été victime de harcèlement dans votre métier ?

Moi, je n’ai jamais subi du harcèlement. J’ai été témoin de remarques, de choses, de comportements qui ne sont pas directs par rapport au témoignage de Clémentine Sarlat. Après, il y a des choses quand même… On constate avec les femmes qui sont enceintes, de retour de congés maternité… il y a souvent des petits trucs qui coincent, qui ne sont pas normaux. Mais moi, je n’ai jamais eu, personnellement, de gros soucis.

Que pensez-vous du témoignage de Clémentine Sarlat ?

C’est évidemment une très bonne chose d’en parler, ouvertement, avec des détails précis pour qu’on se rende compte, quand même, de la gravité de la situation. Plus on en parle, plus ça devient une réalité. En plus, Clémentine Sarlat, c’est quelqu’un. C’est une journaliste qui est quand même très reconnue, très appréciée, très compétente. Ce n’est pas n’importe qui. J’ai lu son interview, je ne me suis pas dit « ah, elle est opportuniste », non. Je me suis dit « c’est bien, c’est bien qu’elle l’ait fait » puis de toute façon, que ce soit dans le journalisme ou dans n’importe quel milieu, il faut que les femmes prennent la parole au maximum et que le mouvement ne s’essouffle pas pour qu’on arrive, dans tous les secteurs de la société, à briser les barrières, à se remettre en question. Encore et encore. C’est donc une initiative que je salue.

circle-cropped (3)

Rédactrice

Rédactrice sur majmedia. Bucolique et mélodramatique… Cela fait plus de vingt piges que je vadrouille, le stylo en poche. Journaliste le jour, écrivaine la nuit, on se retrouve vite pour de nouvelles aventures !